Les incertitudes des lendemains
J.-M. Nobre-Correia
Politique : Encore
une fois, des amis francophones me disent ne pas bien saisir ce qui se passe au
Portugal après les élections du 4 octobre et la chute du gouvernement hier.
Voici quelques explications provisoires…
Mes
chers Amis francophones,
malgré
le renversement hier du gouvernement de droite (PSD-CDS), la situation
politique au Portugal est très complexe et fragile [1]. Et on
se demande quel sera l'avenir du gouvernement "de gauche" (en fait du
PS) annoncé et l'avenir de la nouvelle "gauche unie". D’autant plus
qu’aucune rencontre n’a jamais eu lieu entre les quatre partis qui la composent.
Et que les rencontres comme les accords signés ont été bilatéraux, entre le
Parti socialiste et chacun des trois autres partis (BE : Bloc de Gauche,
PCP : Parti communiste portugais et PEV : Parti écologiste les Verts [2]) !…
Ce
qui est certain est que l'union totale (sans aucune faille) de la gauche hier
au parlement (Assemblée de la République) [3] marque
date dans l'histoire contemporaine du Portugal. Et marquera, j'en suis
convaincu, un tournant au sein de l'architecture du paysage politique
("partidaire") portugais.
Non
seulement le BE, le PCP et le PEV sont sortis du ghetto où toute la gauche à la
gauche du PS avait été mise en novembre 1975 (...il y a 40 ans !). Mais, en
outre, j'en suis convaincu, que l'on assistera à une redistribution des cartes
électorales "partidaires" au sein de cette gauche.
Par
ailleurs, la droite est devenue incroyablement radicale et droitière : depuis
cinq semaines, ses ténors ont recours à un langage d’une invraisemblable
agressivité, ses manœuvres en coulisses dépassent tout ce qui est
démocratiquement acceptable et elle a même cherché à déclencher une
manifestation de masse hier devant le parlement (avec de très faibles
résultats), alors même que les médias d’information soutiennent massivement ses
positions. Ce qui ne va pas sans poser de sérieux problèmes pour l'avenir.
Surtout que le centre "partidaire" est devenu un vrai "no man's
land".
En
attendant, il faudra voir ce que le président de la République (un personnage
intellectuellement, culturellement et politiquement fort limité, et incroyablement
hargneux) va décider ces jours-ci. D’autant plus qu’il est en fin de mandat et
ne pourra pas dissoudre le parlement : des élections présidentielles
auront lieu en janvier, le nouveau président entrant en fonctions début mars.
Il
faudra donc laisser décanter la situation ...afin que l'on puisse avoir des
idées plus au moins claires et pouvoir ainsi écrire sur ce qui se passe au
Portugal 40-41 ans après la Révolution des Œillets [4] !
Amicalement
vôtre.
[1] Voir aussi J.-M. Nobre-Correia, « Cette jouissance éphémère… »,
in Notas de Circunstância 2, 8
octobre 2015.
[2] Depuis toujours, le PEV se présente aux élections avec le PCP au sein
de la CDU (Coalition démocratique unitaire).
[3] Et même de
toute l’opposition, le parti PAN (Personnes Animaux Nature)
qui compte désormais un député à l’Assemblée de la République a également voté
contre le gouvernement de droite, le résultat final étant dès lors de 123
contre les 107 députés de droite.
[4] Voir à ce propos J.-M. Nobre-Correia, « Ce lointain parfum d’œillets… »,
in Notas de Circunstância 2, 6 mai
2014.